"Natural Goodness" (2001):
Quel sens peut-on
donner à l’adjectif « bien » ? Il suffit de comparer le
comportement d’une abeille à celle d’un homme qui agit comme « il devrait
agir » selon une nécessité propre. C’est pourquoi, le « bien
naturel » est ce qui est nécessaire ou favorable à une forme de vie. De ce
fait, on peut caractériser le bien des êtres vivants comme « une
excellence intrinsèque ou autonome en ce qu’elle dépend directement de la
relation d’un individu à la forme de vie de son espèce. » Il faut donc
bien rendre compte, lors d’une évaluation morale, d’un cycle vital :
quelle est la fonction d’un organisme ? Quel est le bien que cela
apporte ? De là, il est possible d’extrapoler cette excellence des êtres
vivants aux actions humaines :
« La manière dont
un individu devrait être est déterminée par ce qui est nécessaire à son
développement, à son autoconservation et sa reproduction. » Si l’on suit
ce raisonnement, il est facile d’évaluer un être vivant en fonction de lui-même
sans tenir compte de nos intérêts et de nos désirs.
Si l’excellence des
êtres vivants dépend de la « forme de vie de l’espèce », on est en
droit de s’interroger sur la nature de la forme de vie humaine. Or, le bien
humain est un bien « sui generis » ; l’excellence pour les êtres
humains est la vertu ; d’où la nécessité
d’agir « tout bien considéré. » Il est intéressant de noter
toutefois que l’adéquation d’un être à la forme de vie de son espèce concerne
aussi bien les plantes, que les animaux que les hommes. Mais le bien lié à la
survie est quelque chose de plus complexe chez l’homme que chez l’animal
reconnaît l’auteure. L’action morale chez l’homme est partie intégrante de la
rationalité pratique. C’est pourquoi, les êtres humains ont la capacité de
« voir des raisons » ; autrement dit d’agir selon une raison
« tout bien considéré. » En revanche, les animaux sont dans
l’incapacité d’agir rationnellement ou irrationnellement, puisque le choix ne
concerne que les êtres humains. En s’inspirant de l’analyse de Saint Thomas
d’Aquin, Philippa Foot refuse d’admettre une compréhension des fins de l’action
chez les animaux. Il faut en effet apprendre des jeux de langage pour donner un
sens à son action. Il semble donc que les êtres vivants dans leur propre accomplissement ou
développement réalisent une excellence spécifique sans réflexion, sans peser
des raisons. On peut donc en déduire que l’homme est un être vivant d’un genre
spécifique. L’être humain possède une capacité à accepter « des bonnes
choses pour soi-même ».
Il est intéressant à notre sens d’établir une
comparaison entre l’excellence d’un être vivant – réalisation de la vie de son
espèce » et l’excellence d’un être humain – l’accomplissement d’une bonne
vie. Il est vrai que l’effort de Foot consiste à bannir l’antinaturalisme de
Moore : le bien n’est pas une propriété non-naturelle, mystérieuse (même
critique que l’on trouve chez I Murdoch).
La richesse de cet
ouvrage tient à ses nombreuses sources : Aristote, Anscombe, Wittgenstein,
Davidson, Thompson (des références repensées). Il s’agit de défendre une thèse
assez discutable, celle du lien nécessaire entre le jugement moral et l’action.
Il reste à savoir si l’objectivité du bien constitue une force
motivationnelle ; question complexe qui ne peut faire l’économie ni des
raisons d’agir, ni de l’ignorance, ni de
la faiblesse de la volonté.